Objet de dispute entre l’Argentine et le Royaume-Uni, ces îles sont au cœur des tensions entre les deux pays. Trente ans plus tôt, ils s’étaient livrés une guerre.
Si l’attention des chancelleries occidentales se porte sur la situation explosive au Moyen-Orient, au loin dans l’Atlantique Sud, deux pays semblent rejoués le scénario d’une confrontation. Une confrontation qui a déjà été livrée en 1982 suite à l’attaque surprise des forces militaires argentines.
Entre avril et juin 1982, les deux pays se sont affrontés dans un cadre militaire restreint causant plus de 900 morts dont 649 du côté des militaires argentins. Ce petit archipel, situé à 480 kilomètres des côtes argentines, suscite une dispute originale entre l’Argentine et le Royaume-Uni. La population de l’île est majoritairement originaire des îles britanniques, ainsi Londres s’appuie sur l’article 73 de la Charte des Nations Unies, affirmant la volonté des peuples de disposer d’eux-mêmes, pour légitimer sa souveraineté sur les îles Falkland. Du côté argentin, on souligne, avec vigueur, le droit des peuples à la décolonisation. En effet, l’Argentine accuse le Royaume-Uni d’avoir colonisé cet archipel à partir de 1833.
L’histoire des Malouines débute en 1592 lorsque John Davis en fait sa découverte. Mais les premiers véritables colons à s’installer sur l’archipel sont les marins et pêcheurs de Saint-Malo qui donnera le nom de Malouines (Malvinas en espagnol). Cette dénomination est contestée par le Royaume-Uni et selon la norme ISO (ISO 3166) de codage des pays, le nom Falkland a été officiellement retenu.
La contestation de la souveraineté britannique sur les îles n’interviendra qu’à partir de 1976 avec l’arrivée au pouvoir de la junte militaire en Argentine. Suite à un embargo sur les armes imposé par les États-Unis, à partir de 1978, alors que la Royal Navy a maintenu son activité dans la zone. En 1982, dans un contexte de division intérieure, les militaires veulent réunir autour d’eux la population argentine. Soutenu par la gauche péroniste, la revendication des îles est communément partagée par l’ensemble de la nation argentine comme un élément de justice historique.
L’offensive militaire qui s’en est suivie a été un échec important pour la dictature militaire. La réplique de l’armée britannique, alors dirigée par Margaret Thatcher, a été décisive. La communauté internationale désavoue l’offensive de Buenos Aires sur les Malouines. L’URSS et la Chine s’abstiennent, l’Argentine se retrouve isoler malgré le soutien du Pérou. La guerre qui dura 72 jours se conclus par la défaite des forces argentines après la reddition, le 14 juin 1982, du commandant du Mario Menendez et de ses 10 254 hommes. La souveraineté britannique sur l’archipel est retrouvée dans son intégralité.
Cristina Kirchner, la passionaria nationaliste ?
En 2012, la question des Malouines refait surface et tend de nouveau les relations entre les deux pays. Après un difficile rétablissement des relations diplomatiques, l’arrivée à la Casa Rosada de Cristina Kirchner a provoqué un brusque refroidissement. Déjà à l’occasion de son premier mandat, les îles Malouines avaient suscité un point de fixation de la présidente compliquant les relations avec le Premier ministre Gordon Brown. L’arrivée de David Cameron à Downing Street complique les rapports entre les deux pays.
Largement réélue en octobre 2011, Cristina Kirchner pouvait abandonner la carte nationaliste auprès de la population. Ainsi, les îles Malouines auraient pu réintégrer les archives de l’Histoire. Bien au contraire, depuis le début de l’année 2012, les tensions se multiplient. L’envoi par Londres d’un sous-marin nucléaire est perçu par Buenos Aires comme une volonté manifeste de militariser l’archipel. Considérée comme une escalade, Cristina Kirchner, à l’occasion d’un discours le 7 février 2012, a indiqué que son pays allait se saisir du Conseil de sécurité des Nations unies pour traiter de l’affaire. La présidente argentine a dénoncé « la militarisation de l’Atlantique Sud » et tend la main au Premier ministre britannique par le biais du dialogue comme « une opportunité à la paix ».
Sur ces entre-faits, la Grande-Bretagne a réagi en rappelant son droit sur les îles en s’appuyant sur la Charte des Nations unies et le droit à l’autodétermination des insulaires. Depuis 1982, la position britannique n’a pas varié d’un iota prouvant son bon droit sur les îles Falkland. En attendant, un probable apaisement, les tensions commencent à agiter la région. Lors du XIème sommet de l’ALBA (Alternative Bolivarienne des peuples d’Amérique) à Caracas, Hugo Chavez a tenu a exprimé son soutien au peuple argentin dans sa lutte légitime contre l’impérialisme. Il a réaffirmé sa volonté d’aider l’Argentine dans le cas hypothétique d’une confrontation armée. Des propos qu’il avait déjà tenu ces dernières années, toujours en rapport avec les Malouines.
En revanche, les États-Unis ne se sont pas encore ouvertement exprimés sur la question. Or le Brésil, la puissance régionale, a régulièrement annoncé son soutien à la cause argentine. Cependant, les autorités brésiliennes se veulent modérer sur cette question et souhaitent avant tout préserver la stabilité dans la région. Durant sa présidence, Lula souhaitait donner au Brésil un certain relief au niveau de la sécurité régionale. Le pays a vocation à être un leader sur cette question dans l’organisation d’un système de sécurité collective que l’ensemble des leaders de la région désirent mettre en œuvre. Malgré des différences idéologiques, les pays d’Amérique latine s’accordent pleinement sur la vision commune de leur politique dans de nombreux domaines comme l’économie, la culture. La politique de défense et de sécurité collective reste largement en retrait.
Dans ce contexte, la posture de Buenos Aires dans sa revendication des îles Malouines souffre d’un déficit de crédibilité sur le plan militaire. Ses forces armées sont désuètes et ne constituent en aucun cas un moyen de pression réel sur le Royaume-Uni. À ce jour, le Royaume-Uni n’entend céder à aucun chantage qu’il soit politique ou militaire. Comme pour la question de Gibraltar, Londres ne cédera pas sur la question de sa souveraineté sur les îles Malouines ou les autres îles de l’Atlantique Sud. Cristina Kirchner, avec sa verve, espère réunir la population argentine autour de sa cause. Mais les effets d’annonce répétés, ces dernières années, dénotent un enjeu de politique intérieure plus qu’une opposition frontale avec un autre pays.
Alors prochainement, à l’occasion du trentième anniversaire de la guerre des Malouines, les frictions entre les deux protagonistes redoubleront sans aucun doute. Mais, le déséquilibre du rapport des forces rend inimaginable une nouvelle confrontation. Les Malouins pourront, eux, s’associer pleinement au soixantième anniversaire du règne de leur reine Elisabeth II.
F.V.
Intéressant et informatif. Merci pour cet article.
Ça m’a également poussé à étudier davantage l’histoire des Iles Kouriles.
You’re welcome ! 🙂