Les médias officiels nord-coréens ont annoncé, lundi 19 décembre, la mort de leur dirigeant Kim Jong-il. Son fils, le camarade Kim Jong-un vient d’être proclamé successeur.
Dévasté par une attaque lors d’un voyage en train blindé à travers le pays, Kim Jong-il sort définitivement de la scène dans un hors-piste inattendu. Même si, depuis plusieurs années, la santé fragilisée du leader nord-coréen semblait compter les jours du « Cher Leader », l’annonce de sa mort suscite quelques interrogations.
Le moment exact de sa mort reste encore trouble, mais elle pourrait remonter au samedi 17 décembre 2011. La propagande a évidemment orchestré l’annonce de cet événement et mis en scène les conséquences de cette nouvelle. La présentatrice de la télévision d’Etat (KCNA) s’est présentée, vêtue de noir, devant les caméras pour annoncer la tragique information auprès de la population nord-coréenne. Dans la capitale Pyongyang, la population a tenu à exprimer son désespoir. La propagande officielle a largement diffusé les sanglots, la détresse, l’hystérie collective d’une population orpheline de son « Cher Leader ». Ces images interrogent évidemment sur la réalité de la spontanéité de ces manifestations de tristesse.
La Corée du Sud a placé ses troupes en état d’alerte, le Japon reste circonspect sur l’attitude à suivre, la Chine et la Russie ont présenté leurs condoléances. Les pays occidentaux restent partagés entre l’espoir d’une ouverture du régime et la crainte de son raidissement. Suite à l’annonce de la disparition de Kim Jong-il, l’armée nord-coréenne a procédé à l’essai d’un missile de courte portée. Les autorités ont pourtant tenu à démentir tout lien de cause à effet entre les deux événements. Mais les inquiétudes subsistent quant à la future orientation politique du régime nord-coréen.
L’heure du « Brillant Camarade »
D’ores et déjà, Pyongyang a confirmé la passation du pouvoir en faveur de Kim Jong-un, désigné comme successeur du « Cher Leader ». Les médias ont déjà prêté allégeance à leur « Brillant Camarade » dont ils affirment toute leur confiance dans leur nouveau dirigeant. Malgré tout, sa jeunesse et son inexpérience laissent présager une lutte intestine au sein de l’appareil étatique. Le beau-frère du dirigeant défunt, Jang Song-taek, apparaît comme le nouveau parrain du royaume Ermite. Ce dernier pourrait se révéler être la clé du voûte de la nouvelle architecture du pouvoir qui se dessinera dans les prochaines semaines. Depuis l’été 2010, Kim Jong-un a été officiellement intronisé comme le « Grand Héritier » à la tête de la République Populaire Démocratique de Corée. Ces derniers mois, il a multiplié les apparitions pour s’imposer comme le futur dirigeant. Mais à moins de 30 ans, il n’apparaît pas avoir développé l’étoffe d’un chef à la fois politique et militaire.
De surcroît, il est plus que probable que la vieille garde militaire ait un puissant relais dans les futures décisions qui seront prises pour orienter la politique du pays. La communauté internationale espère que la disparition de ce dirigeant « irrationnel » et « imprévisible » offrira de nouvelles perspectives dans la pacification de la péninsule coréenne et sa dénucléarisation. Mais les autorités de Séoul craignent avant tout l’instabilité du pouvoir nord-coréen. En effet, même si la vision paranoïaque de Kim Jong-il déroutait l’ensemble de ses interlocuteurs, même ses proches alliés comme la Chine, il dirigeait d’une main de fer l’un des pays les plus pauvres du monde. Victime de la famine, sa population reste largement opprimée par un régime totalitaire qui ne relâche pas la pression. Habile dans le chantage politique, il a fait du nucléaire son bouclier ultime pour la survivance d’un régime complétement ruiné économiquement.
Le système socialiste nord-coréen a failli, l’effondrement de son économie n’a pas altéré les ambitions politiques d’un régime totalement militarisé. Une nouvelle ère s’ouvre pour le pays avec l’arrivée au pouvoir de la troisième génération de la dynastie Kim, une première dans toute l’histoire du communisme. Dans l’immédiat, il est peu probable d’envisager un changement de direction significatif. La caste qui s’est constituée à l’intention de conserver le pouvoir. Un pouvoir qui ne doit montrer aucune faiblesse tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. Pour les Nord-Coréens, la vie continuera à ressembler à l’enfer sur terre, loin de l’image lissée du « paradis socialiste » que le cinéaste Kim Jong-il a voulu propager :
F.V.
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