Les élections primaires dans le camp républicain frôlent l’étrange voire le ridicule. Revue des troupes en lice.
Dans les rangs du parti Républicain, la campagne des élections présidentielles 2012 est lancée depuis cet été. L’absence de Sarah Palin de la course républicaine a éclairci le paysage en faveur de Mitt Romney, mais plusieurs outsiders ont fait leur apparition : Rick Perry, Herman Cain ou encore Newt Gingrich. Ils sont plus d’une dizaine à avoir franchi le pas pour des primaires qui manquent jusqu’à présent de profondeur. La campagne été marquée jusqu’alors par sa médiocrité. À ce jeu-là, certains ont su défavorablement se distinguer. Découverte d’un plateau républicain assez inédit.
Rick Santorum, rescapé du Google-bombing
Ce sénateur de Pennsylvanie s’est fait remarquer en 2003 par des propos anti-gay. Rapidement il s’est attiré les foudres de cette communauté et a expérimenté, dès 2004, un Google-bombing. En effet, pour contrer le propos de Rick Santorum, la riposte menée par Dan Savage a consisté à donner une définition à caractère sexuel au mot « santorum ». Résultat : ce néologisme se retrouve en tête du moteur de recherche Google. Ce fervent croyant catholique lutte contre l’avortement et le mariage homosexuel. Un cheval de bataille qui n’est pas propre à ce seul candidat. Il est le candidat le plus faible parmi ces huit prétendants. Pour sa campagne, il n’a pas hésité à reprendre le slogan de Mike Huckabee, ancien candidat à l’investiture républicaine en 2008 : « Faith, Family, Freedom ».
Parmi ces trois piliers fondateurs de la campagne de ce candidat ultra-conservateur, une vidéo évoque la place de la famille d’après sa propre expérience. Père de neuf enfants, il évoque son dernier enfant handicapé :
Pronostic pour l’investiture du candidat Santorum : 4%
Michele Bachmann, l’icone déchue
Elle est avec Sarah Palin, l’égérie du mouvement populiste Tea Party. Actuellement, élue à la Chambre des Représentants au Congrès, elle n’est jamais parvenue jusqu’à présent à décoller dans les sondages. La candidate aux origines norvégiennes est officiellement l’étendard du mouvement anti-Washington. Elle se prononce contre les dépenses publiques au niveau fédéral favorisant la relance de l’économie étatsunienne. Cette mère de cinq enfants défend elle aussi des positions très conservatrices concernant les questions de société. Mais les sondages se sont progressivement effrités au fil de l’été passant de 16% à 7%. En tant que doppelgänger – jumelle maléfique – de Sarah Palin, elle se montre passablement faible sur les questions de politique internationale. Dépourvue face à ses adversaires directs, elle vient de les qualifier de « socialistes au rabais » ; une preuve de faiblesse.
Pronostic pour l’investiture de la candidate Bachmann : 8%
Newt Gingrich, l’air du moment
Newton Gingrich représente le roublard de la maison Républicaine. Ancien président de la Chambre des Représentants de 1995 à 1999, il concourt une nouvelle à l’investiture du Great Old Party. Il est à l’heure actuelle le candidat qui monte dans les sondages alors que les principaux favoris connaissent une baisse de régime assez significative. Cet ancien professeur d’histoire revient de loin. Après un début de campagne catastrophique où son comportement a interpellé le camp républicain. En effet, au lieu de mener campagne dans le New Hampshire et l’Iowa, Newt Gingrich préfère partir avec Calista, sa troisième femme, faire une croisière dans les îles grecques pendant deux semaines. Cette frasque quasi-suicidaire s’est finalement évanouie face à l’absence d’un leader incontestable. Admirateur de Charles de Gaulle, il se perçoit lui-même comme un recours pour établir les réformes nécessaires. Cependant son passé politique ambivalent – notamment pour avoir instrumentalisé l’affaire Monica Lewinsky, alors que celui-ci entretenait une relation extraconjugale – pourrait lui couter l’investiture. Alors Newt comme ultime sauveur des États-Unis d’Amérique ?
Pronostic pour l’investiture du candidat Gingrich : 12,5%
Mitt Romney, candidat par défaut ?
Défait par John McCain en 2008, l’ancien gouverneur du Massachusetts, pourrait obtenir sa revanche en 2012. Leader incontesté des sondages depuis le début de la campagne, Mitt Romney laisse toujours sceptique une grande partie de son propre camp. Beaucoup de Républicains le suspectent de possible compromission avec le camp démocrate, une fois à la Maison Blanche. Mormon, Mitt Romney dérange les habitudes républicaines. Au printemps, il fait acte de contrition en reconnaissant la responsabilité de l’Homme dans les changements climatiques. Pour les conservateurs, l’ancien gouverneur vient de commettre une hérésie. Alors Mitt Romney entame son chemin vers Canossa et, au début de l’automne, rentre dans le rang des climato-sceptiques. Par ailleurs, face à une faible concurrence, la candidature Mitt Romney poursuit son cheminement dans le corps électoral républicain. Au-delà du mépris qu’il suscite au sein de l’électorat conservateur, Mitt Romney apparaît comme le candidat capable de battre le président sortant.
De surcroît, Mitt Romney a su lever rapidement des fonds pour financer sa campagne, soulignant l’important soutien qu’il bénéficie. En tête parmi les candidats Républicains, les sommes récoltées sont près de deux fois moins importantes que lors de la précédente investiture. Preuve d’un déclin relatif du parti républicain ? Barack Obama a déjà obtenu le triple des fonds mobilisés par Mitt Romney. Le président a pris une avance qui peut s’avérer décisive sur ses concurrents.
Pronostic pour l’investiture du candidat Romney : 35%
Herman Cain, le populiste embourbé
Issu du milieu privé, Herman Cain s’affirme comme un populiste. Rapidement, il est devenu le porte-parole du Tea Party. Ancien patron d’une chaîne de pizzeria, Godfather’s Pizza, Herman Cain s’illustre par son absence de réelle expérience politique. Le candidat du 9-9-9 s’est rapidement propulsé comme l’un des favoris à la course pour l’investiture. Son programme économique assez simple (simpliste ?) consiste à une règle de neuf : un taux de 9% pour l’impôt sur le revenu, 9% pour l’impôt sur les sociétés et 9% pour la taxe sur les ventes. Face à une progression exponentielle au sein de l’électorat républicain, les experts sont restés incrédules. Mais cette ascension vient d’être interrompue. Ces dernières semaines, Herman Cain doit faire face à ses fantômes passés. Ainsi, des accusations d’harcèlement sexuel sont remontées à la surface. Après le déni, il a reconnu une plainte ; sa femme est également intervenue pour apporter son soutien. Pour Herman Cain, loin d’un Yes we Cain, son destin s’approche plutôt d’un autre défunt présidentiable, celui-là français : Dominique Strauss-Kahn.
Pronostic pour l’investiture du candidat Cain : 14%
Rick « The Boner » Perry
Gouverneur du Texas, successeur de Georges W. Bush, Rick Perry a tous les atouts pour remporter l’investiture. Celui qui estime avoir le plus travail au monde, celui de gouverneur d’un riche État, est déjà hors-piste. Alors qu’il partait favori, il cumule depuis le mois d’août la provocation et le ridicule. Ainsi, le 16 août 2011, il accuse Ben Bernanke, président de la Réserve Fédérale, de « trahison » si celui-ci met en place un énième quantitative easing, c’est-à-dire mettre en branle la planche à billet pour soutenir l’économie étatsunienne. En guerre contre la Fed, Rick Perry s’est attiré les foudres jusqu’au sein de son propre camp. Depuis, il enchaîne les maladresses. La dernière en date est son trou de mémoire concernant l’un de ses trois axes pour diminuer les dépenses fédérales. Une faute impardonnable que Rick Perry a parodiée, durant The David Letterman Show, avec humour. Même s’il n’est pas investi, Rick aura su mettre l’ambiance dans le manoir Républicain.
Pronostic pour l’investiture du candidat Perry : 8%
Ron Paul, l’éternel franc-tireur
Le candidat libertaire est une nouvelle fois candidat, et les sondages le portent surfant sur une conjoncture économique moribonde. Isolationniste, Ron Paul est favorable à un désengagement quasi-systématique de l’État dans la gestion du pays. Il propose en particulier de diminuer d’un billion de dollars le budget fédéral dès sa première année à la Maison Blanche. Une vision radicale qui trouve un écho relatif à l’aune de l’émergence du Tea Party. Cependant s’il demeure très actif sur les réseaux sociaux, Ron Paul reste marginalisé au sein des médias mainstream. À 76 ans, « Doctor No » mène sa dernière campagne présidentielle ; à lui de faire peser ses idées dans le camp républicain. La famille Paul, elle, a déjà trouvé son héritier avec Rand Paul, qui a 48 ans, est sénateur du Kentucky.
Pronostic pour l’investiture du candidat Paul : 5%
Jon Huntsman, un étalon chez les Républicains
Le benjamin de ces primaires est certainement le plus grand outsider de l’actuel débat. Ancien ambassadeur auprès de la République Populaire de Chine (août 2009 – avril 2011), il est le candidat ayant une expérience en matière de politique étrangère. La crédibilité de son projet économique lui a permis de s’attirer les bonnes faveurs des médias. Un atout qui s’avère indispensable pour accroître son audience auprès de l’électorat républicain. L’ancien gouverneur de l’Utah est l’homme que redoute Barack Obama. Un sondage du New York Times montre que Jon Huntsman, dans les circonstances actuelles, est le Républicain en position de battre assez nettement le président démocrate.
Avec Jon Huntsman, Mitt Romney se voit opposer un réel concurrent, même s’il ne bénéficie pas de fonds de soutien comparable à l’ancien gouverneur du Massachusetts. En outre, une telle candidature a le mérite de faire renaître le débat d’idées dans le camp républicain.
Pronostic pour l’investiture du candidat Huntsman : 13,5%
Au final, la campagne républicaine est bien lancée, avec dans moins de deux mois le vote avec le caucus dans l’État de l’Iowa. Ce vote du 3 janvier 2012 n’est pas décisif mais il est un indicateur de la suite des primaires. Certains candidats ne se présenteront pas préférant se concentrer sur les primaires dans le New Hampshire qui se déroulent une semaine plus tard. En attendant les premiers résultats, les candidats poursuivent les débats. Le dernier organisé par CBS portait sur la question de la politique étrangère. Une question qui a dévoilé des lignes de faille au sein du camp républicain tant sur la torture que sur la question du nucléaire iranien.
F.V.
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