François Hollande souhaite la création d’un grand parti de gauche
Dimanche dernier, invité de l’émission politique de France 3, France Europe Express, François Hollande exprimait son souhait de voir la création, après les législatives, d’un grand parti « qui va de la gauche, sans aller jusqu’à l’extrême gauche, jusqu’au centre-gauche ou au centre ». Après avoir été à la tête du Parti socialiste pendant 10 ans et lors de ses deux grands échecs historiques, en 2002 et 2007, François Hollande présente son projet de rénovation et ne s’avoue pas vaincu. Drôle de posture pour un responsable politique qui met la morale au-dessus de tout. La logique serait de s’effacer, puisque la stratégie qu’il a menée a échoué, plutôt que de s’accrocher désespérément aux rennes du parti après deux échecs cuisants et alors que d’autres ont plus de légitimité. On pense bien entendu à Ségolène Royal ou Dominique Strauss-Kahn.
Revenons en arrière. C’est le séisme du 21 avril 2002 et la présence de Jean-Marie Le Pen au deuxième tour de la Présidentielle qui fissura la maison socialiste. François Hollande, voulant la sauver, laissa au contraire les murs se lézarder. Unité de façade, ambitions personnelles réprimées, refus de tout débat idéologique, synthèse, les 5 années d’opposition ont été un long combat du Premier secrétaire pour conserver le Parti socialiste en l’état, conserver son unité avant tout, peu importe les désaccord et les incompatibilités. 35 ans d’histoire le regardent.
Le référendum avait pourtant révélé au grand jour des contradictions idéologiques inconciliables : la gauche tendance gauche de la gauche anti-libérale de Laurent Fabius et la social-démocratie, ouverte aux lois du marché et à la mondialisation, de Dominique Strauss-Kahn. Il aurait fallu choisir, soit mettre au banc Laurent Fabius et ses partisans, minoritaires dans le parti, soit, si ceux-ci ne l’acceptaient pas, les laisser faire scission et partir. Au lieu de ça, le Congrès du Mans en 2005 a accouché de la « synthèse », véritable fouillis idéologique, par peur de la scission. Démolir pour tout reconstruire, peu en sont capables.
Comble de l’obstination, le programme du PS pour la Présidentielle a été adopté alors que le candidat du parti à cette élection n’avait même pas encore été désigné. But secret, ne donner à aucun éléphant l’impression qu’il était le vainqueur et allait prendre la place du Premier secrétaire à la tête du parti. Résultat, Ségolène Royal candidate désignée, dut faire perpétuellement le grand écart entre ses propres convictions, dont on a bien vu lors de la primaire qu’elles étaient porteuses, et un programme auquel elle ne croyait pas. Unité conservée mais électeurs envolés. La perversité de cette équation eu son apogée lorsqu’en février François Bayrou arriva au niveau de la candidate socialiste dans les sondages. L’électorat de centre-gauche avait fui. La Présidente de Poitou-Charentes exprima après coup, son désir de reprendre sa liberté mais c’était trop tard, il ne restait que 3 mois de campagne contre une stratégie qui durait depuis 5 ans.
Refonder un grand parti de gauche sur le même modèle ? Ambition hasardeuse et vouée à l’échec, comme en 2002 et 2007. Du communisme au centre, il y a un fossé, un ravin, voire un antagonisme irréconciliable. François Hollande qui a réalisé avec succès la synthèse au Parti socialiste, se voit peut-être en maître de cérémonie de ce grand parti et il en aurait la capacité. Sauf qu’un électorat s’identifie à des idées, non pas un fourre-tout idéologique dont le seul rôle est d’être une machine de guerre contre le camp adverse, sur le principe l’union fait la force. Ou alors, comme à l’UMP, il faut qu’une partie des responsables et des militants range leurs convictions au profit de celles du leader. A gauche, on n’a pas cette culture et François Hollande, plutôt que de se remettre en question, essaie de perpétuer une même stratégie qui entraînera les mêmes défaites.
R.C.
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